À 3 ans, Laurence avait déjà de
violents maux de tête. À 5 ans, ses colères lui laissaient les yeux
cernés comme ceux d'une adulte. Ses parents ont alors frappé à la porte
d'un psychologue qui, malgré ses bons conseils, a fini par s'avouer à
demi vaincu.«Avec ses crises, Laurence
se faisait réprimander, mais ça provoquait toujours de nouvelles crises.
C'était un cercle vicieux. À la fin, elle pleurait presque sans arrêt»,
explique sa mère.Les deux aînés commençaient à prendre leur petite soeur en grippe. Au
bureau, sa mère pleurait d'impuissance dans les toilettes. «Plus rien ne
fonctionnait, j'étais en train de sombrer, dit-elle. Et Laurence me
suppliait: "Maman, s'il te plaît, aide-moi. Appelle le docteur. Je ne
suis plus capable."»Le docteur en question a prescrit un médicament qui diminue
l'hyperactivité, l'impulsivité et l'anxiété des enfants. Après plusieurs
semaines, les pleurs de Laurence ont enfin diminué. Pour la première
fois de sa courte vie, la fillette a commencé à sourire au réveil. Et la
dépression qui se profilait a été évitée.Chez d'autres enfants, la détresse est déjà si profondément installée
qu'on doit leur prescrire du Prozac. C'est le seul antidépresseur
approuvé pour les enfants. Il leur sauve parfois la vie, mais il peut
aussi accroître les risques de suicide.Aux États-Unis, où le système de santé est très différent du nôtre, les
psychiatres et pédiatres en prescrivent à tort et à travers, dénonce le
psychologue Michel Yapko dans ses livres et ses conférences. «Un médecin
m'a avoué en avoir déjà donné à un bébé de 18 mois, alors qu'aucune
étude ne permet d'en connaître les effets sur un cerveau aussi jeune!»
s'indigne-t-il en entrevue. «Nous avons trop tardé à reconnaître la dépression chez les enfants. Et
maintenant que ce problème prend de l'ampleur, nous avons de toute
urgence besoin de solutions. Pris seuls, les médicaments causent le plus
fort taux de rechute, parce qu'ils n'enseignent pas aux jeunes comment
résoudre leurs problèmes. Et les thérapies traditionnelles, axées sur la
parole, ne sont pas adaptées aux enfants.»Au Québec, les pédopsychiatres se disent très réticents à prescrire des
médicaments aux écoliers. Lorsqu'ils le font, c'est justement pour que
la psychothérapie et la thérapie familiale aient des chances de
fonctionner, précisent-ils.Cela s'impose souvent lorsque, comme dans le cas de Laurence, plusieurs
problèmes coexistent. «La dépression associée à de l'anxiété devient
beaucoup plus chronique et difficile à traiter», explique Jean-Jacques
Breton, chercheur à Rivière-des-Prairies.À l'hôpital de Montréal pour enfants, la Dre Lila Amirali tente
d'attendre quelques semaines avant de prescrire des médicaments. «Mais
dans une grande proportion des cas, on finit par en donner, dit-elle.
Les enfants nous arrivent trop tard. Après plusieurs mois, les symptômes
ont déjà fait trop de dégâts. Il faut d'abord les gérer.»Signe d'un manque criant de ressources, en région éloignée, les enfants
se voient souvent prescrire immédiatement des médicaments, précise la
pédopsychiatre, parce qu'ils n'ont tout simplement pas accès à d'autres
formes de traitements.
violents maux de tête. À 5 ans, ses colères lui laissaient les yeux
cernés comme ceux d'une adulte. Ses parents ont alors frappé à la porte
d'un psychologue qui, malgré ses bons conseils, a fini par s'avouer à
demi vaincu.«Avec ses crises, Laurence
se faisait réprimander, mais ça provoquait toujours de nouvelles crises.
C'était un cercle vicieux. À la fin, elle pleurait presque sans arrêt»,
explique sa mère.Les deux aînés commençaient à prendre leur petite soeur en grippe. Au
bureau, sa mère pleurait d'impuissance dans les toilettes. «Plus rien ne
fonctionnait, j'étais en train de sombrer, dit-elle. Et Laurence me
suppliait: "Maman, s'il te plaît, aide-moi. Appelle le docteur. Je ne
suis plus capable."»Le docteur en question a prescrit un médicament qui diminue
l'hyperactivité, l'impulsivité et l'anxiété des enfants. Après plusieurs
semaines, les pleurs de Laurence ont enfin diminué. Pour la première
fois de sa courte vie, la fillette a commencé à sourire au réveil. Et la
dépression qui se profilait a été évitée.Chez d'autres enfants, la détresse est déjà si profondément installée
qu'on doit leur prescrire du Prozac. C'est le seul antidépresseur
approuvé pour les enfants. Il leur sauve parfois la vie, mais il peut
aussi accroître les risques de suicide.Aux États-Unis, où le système de santé est très différent du nôtre, les
psychiatres et pédiatres en prescrivent à tort et à travers, dénonce le
psychologue Michel Yapko dans ses livres et ses conférences. «Un médecin
m'a avoué en avoir déjà donné à un bébé de 18 mois, alors qu'aucune
étude ne permet d'en connaître les effets sur un cerveau aussi jeune!»
s'indigne-t-il en entrevue. «Nous avons trop tardé à reconnaître la dépression chez les enfants. Et
maintenant que ce problème prend de l'ampleur, nous avons de toute
urgence besoin de solutions. Pris seuls, les médicaments causent le plus
fort taux de rechute, parce qu'ils n'enseignent pas aux jeunes comment
résoudre leurs problèmes. Et les thérapies traditionnelles, axées sur la
parole, ne sont pas adaptées aux enfants.»Au Québec, les pédopsychiatres se disent très réticents à prescrire des
médicaments aux écoliers. Lorsqu'ils le font, c'est justement pour que
la psychothérapie et la thérapie familiale aient des chances de
fonctionner, précisent-ils.Cela s'impose souvent lorsque, comme dans le cas de Laurence, plusieurs
problèmes coexistent. «La dépression associée à de l'anxiété devient
beaucoup plus chronique et difficile à traiter», explique Jean-Jacques
Breton, chercheur à Rivière-des-Prairies.À l'hôpital de Montréal pour enfants, la Dre Lila Amirali tente
d'attendre quelques semaines avant de prescrire des médicaments. «Mais
dans une grande proportion des cas, on finit par en donner, dit-elle.
Les enfants nous arrivent trop tard. Après plusieurs mois, les symptômes
ont déjà fait trop de dégâts. Il faut d'abord les gérer.»Signe d'un manque criant de ressources, en région éloignée, les enfants
se voient souvent prescrire immédiatement des médicaments, précise la
pédopsychiatre, parce qu'ils n'ont tout simplement pas accès à d'autres
formes de traitements.